Il y a de cela quelques années, je suis invité par une organisation zimbabwéenne à visiter un parc animalier qu’elle gère.
L’objectif : passer quelques jours sur place pour évaluer leurs actions de conservation, et, si convaincu, recommander le programme à des volontaires et touristes.
Étant passionné par les félins, j’étais très motivé à l’idée de découvrir un parc spécialisé dans la réhabilitation des lions. Leur programme s’articule en quatre phases :
- Phase 1 : des lionceaux orphelins nés en captivité sont recueillis, nourris et choyés par l’homme.
- Phase 2 : marches en savane avec les humains pour, selon les organisateurs, développer leurs instincts naturels.
- Phase 3 : à partir de 18 mois, les lions jugés « aptes » sont relâchés en groupes dans des espaces clos pour étudier leur comportement social.
- Phase 4 : une fois ces groupes jugés stables, les lions sont censés être réintroduits dans des réserves naturelles déficitaires en population de lions.
Un modèle économique bien huilé
Durant les phases 1 et 2, des touristes fortunés payent des séjours haut de gamme pour nourrir au biberon les lionceaux ou participer à un "lion walk" avec des jeunes lions âgés de 4 à 12 mois.
En parallèle, des volontaires déboursent au moins 1 800 € la semaine, logés sommairement, pour assister les touristes, tout en étant présentés comme des « experts ».
Tout est orchestré :
- Les touristes paient pour une expérience unique.
- Les volontaires paient pour participer à un programme "utile".
- Les mécènes financent les phases ultérieures, convaincus d'œuvrer pour une cause noble.
Le message qui justifie tout cela : réhabiliter des lions nés en captivité pour les réintroduire dans la nature sauvage.
Une réalité cynique : la pseudo conservation
Ce modèle s’est propagé au Zimbabwe, en Afrique du Sud, et même en Namibie.
Mais la vérité est bien plus sombre.
Les grands spécialistes des félins s’accordent à dire qu’il est impossible de relâcher dans la nature des lions nés en captivité et élevés par des humains.
Ils n’ont pas appris à chasser, à évaluer les dangers, à éviter les conflits avec d'autres prédateurs, ni à se protéger dans la savane.
La réalité est donc implacable : ces lions ne peuvent pas survivre seuls.
Alors, que deviennent-ils une fois adultes et inutilisables dans la nature ?
Ils sont vendus à des fermes de chasse où ils seront abattus par des chasseurs en quête de trophées, dans des enclos fermés.
Que faire ? Résister et dénoncer
Face à ce système lucratif et cynique, même les gouvernements peinent à réagir, tant les retombées économiques sont importantes.
Alors à notre échelle, nous devons dire non :
- Boycottez ces centres de "réhabilitation" aux pratiques trompeuses.
- N’emmenez pas vos enfants caresser un lionceau pour une illusion de proximité sauvage.
- Interpellez les tours opérateurs et condamnez les plateformes (comme Tripadvisor) qui mettent en avant ces lieux.
- Renseignez-vous auprès d’ONG fiables avant de participer à un projet.
- Refusez de cautionner cette industrie en apparence bienveillante, mais en réalité meurtrière.